L’intelligence artificielle face au défi climatique : entre espoirs et risques

Une main homme et une main robotique dans un paysage à la fois estivale et hivernale.

Le développement rapide de l’intelligence artificielle (IA) soulève de nombreuses questions quant à son impact sur le changement climatique. Alors que le monde est confronté à l’urgence climatique, il est crucial d’examiner comment cette technologie de rupture peut influencer notre capacité à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à nous adapter aux conséquences du réchauffement climatique. Cet article explore les bénéfices potentiels de l’IA pour l’environnement, ainsi que les défis qu’elle soulève en termes d’empreinte carbone et de gestion des ressources.

1. L’intelligence artificielle au Service de l’optimisation énergétique et de la durabilité

1.1 Efficacité Énergétique et Processus Industriels

L’intelligence artificielle (IA) offre des opportunités significatives pour optimiser la consommation d’énergie et les processus industriels. Selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), les technologies basées sur l’IA peuvent contribuer à réduire la consommation d’énergie de 10 à 20 % dans l’industrie en optimisant les processus de production et en détectant les anomalies. De plus, le projet européen EU-SysFlex, cité par l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria), montre que « l’IA peut aider à intégrer les énergies renouvelables intermittentes dans le réseau électrique en prévoyant leur production et en adaptant la demande en conséquence ».

1.2 Gestion des ressources naturelles et agriculture durable

L’intelligence Artificielle (IA) peut également contribuer à une gestion plus efficace des ressources naturelles. Une étude de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) souligne que « l’IA peut optimiser l’utilisation des intrants agricoles comme l’eau et les engrais, réduisant ainsi leur impact environnemental ». Par ailleurs, le Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (CIRED) met en avant « le potentiel de l’IA pour surveiller et protéger la biodiversité en analysant des données satellitaires et sous-marines ». Les algorithmes d’intelligence Artificielle, en particulier ceux basés sur l’apprentissage profond, permettent d’analyser finement des données brutes massives (images satellite, vidéos sous-marines, données environnementales) pour établir une nouvelle génération d’indicateurs de biodiversité.

2. L’intelligence artificielle pour anticiper et atténuer les risques climatiques

2.1 Modélisation et prévision des catastrophes naturelles

Les capacités de traitement de données de l’intelligence artificielle en font un outil puissant pour modéliser et prévoir les risques climatiques et peuvent contribuer ainsi à la réduction de l’empreinte carbone. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) souligne dans son rapport spécial sur les événements extrêmes que « l’IA peut améliorer la prévision des phénomènes météorologiques extrêmes comme les cyclones et les inondations, permettant une meilleure anticipation et gestion des risques ». En utilisant des algorithmes avancés, les systèmes d’intelligence Artificielle (AI) peuvent analyser des données climatiques massives pour identifier les tendances et les anomalies, offrant ainsi des solutions durables pour atténuer les impacts environnementaux.

2.2 Surveillance des émissions et protection des écosystèmes

L’Intelligence Artificielle peut être mise à profit pour surveiller les émissions de gaz à effet de serre (GES) et protéger les écosystèmes vitaux, contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique et à la réduction de l’empreinte carbone. Une étude du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) montre que “l’IA peut estimer les émissions de méthane des sites d’enfouissement des déchets à partir d’images satellitaires, facilitant ainsi leur surveillance et leur réduction ». Le Shift Project, un think tank sur la transition énergétique, souligne également « le potentiel de l’IA pour optimiser les réseaux de transport et réduire leurs émissions de CO2 ».

3. Les défis environnementaux posés par l’Intelligence Artificielle

3.1 Consommation énergétique et empreinte carbone

Le développement et l’utilisation des modèles d’Intelligence Artificielle, en particulier les IA génératives comme ChatGPT, entraînent une consommation énergétique considérable. Une étude de l’Université de Massachusetts Amherst révèle que « l’entraînement d’un grand modèle de traitement du langage peut émettre autant de CO2 que cinq voitures sur leur durée de vie ». Le Shift Project alerte sur le fait que « la part du numérique dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre pourrait doubler d’ici 2025 pour atteindre 8 %, dont une part importante liée à l’IA ».

L’intelligence artificielle (IA), en particulier les grands modèles de langage comme GPT-4, Bing et Bard, connaît une révolution et peut aider à lutter contre le changement climatique de nombreuses façons (modélisation climatique, matériaux verts, efficacité énergétique, etc). Cependant, l’IA et en particulier le deep learning consomme d’énormes quantités d’énergie, les centres de données représentant 2,5 à 3,7% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Selon l’analyse de l’Arcep et de l’ADEME, en 2022, les équipements et infrastructures numériques représentent 10% de la consommation annuelle d’électricité en France. 

L’entraînement des modèles d’IA et l’inférence (prédictions à partir de nouvelles données) consomment beaucoup d’électricité et génèrent du CO2. Avec l’amélioration des capacités de l’Intelligence Artificielle, ses besoins en énergie augmenteront fortement, ce qui pourrait rendre la décarbonation plus difficile. Il faut cependant toujours comparer l’existant avec ce qui procède. Une requête simple sur un moteur de recherche comme Google génère environ 0,2 gramme de dioxyde de carbone et une requête Chat GPT 0,382 gramme. Mais en proposant des réponses plus pertinentes les IA évitent de nombreuses requêtes inutiles. L’empreinte cumulative de milliards de requêtes quotidiennes sur Google est considérable. 

3.2 Impact matériel et gestion des déchets électroniques

L’Intelligence Artificielle nécessite des ressources matérielles importantes, ce qui soulève des préoccupations environnementales. L’Agence française de la transition écologique (ADEME) alerte sur « l’extraction des métaux rares nécessaires aux technologies de l’IA, qui génère une pollution importante et des conflits géopolitiques ». Le World Economic Forum (WEF) souligne que « les déchets électroniques sont le flux de déchets qui connaît la plus forte croissance au monde, avec une hausse prévue de 30 % d’ici 2030, en partie due à l’obsolescence rapide des équipements d’IA ».

3.3 Effets indirects et rebond

Les effets indirects et rebond de l’Intelligence Artificielle sur l’environnement ne doivent pas être négligés. Une étude de l’Université de Lausanne met en garde contre « le risque d’effet rebond, où les gains d’efficacité permis par l’IA sont contrebalancés par une augmentation de la consommation de ressources ». Le Shift Project souligne également « le rôle des algorithmes de recommandation dans la promotion de modes de vie et de consommation non durables ».

3.4 Les solutions pour réduire l’impact carbone et le coût énergétique des IA

De nombreuses pistes existent pour rendre l’IA plus verte : transparence sur sa consommation d’énergie, utilisation d’énergies renouvelables, gestion plus efficace des ordinateurs, matériel et algorithmes optimisés, modèles adaptés aux tâches, réduction de la taille des modèles, refroidissement innovant des centres de données. Beaucoup des solutions restent encore à trouver mais nous pouvons dores et déjà identifier des pistes intéressantes à explorer

  • Développement de matériels et infrastructures éco-énergétiques (cloud écoresponsables, choix approprié entre CPU et GPU : l’innovation au service d’une intelligence artificielle durable
  • Optimisation des algorithmes et des architectures de l’intelligence artificielle : l’optimisation de modèles et réduction de leur taille à performance égale, choix adaptés de modèles en fonction des besoins, utilisation à bon escient des IA en complément des approches algorithmes classiques. Par exemple, lors d’un encodage avec la solution GreenEncoder utilise le machine learning pour aider à trouver en un minimum d’itérations les meilleurs paramètres pour optimiser le poids et la qualité.
  • Utilisation de l’énergie nucléaire et des énergies renouvelables pour lutter contre le changement climatique et réduire l’empreinte carbone.

En conclusion, l’intelligence artificielle présente à la fois des opportunités et des défis majeurs face à l’urgence climatique. Comme le résume le rapport « Climat, Environnement et IA » de l’ADEME, « l’IA peut être un outil précieux pour la transition écologique, à condition d’être développée et utilisée de manière responsable et sobre en ressources. Pour exploiter pleinement le potentiel de l’IA tout en minimisant ses impacts négatifs, le Shift Project appelle à « une régulation ambitieuse de l’IA, intégrant des critères de durabilité et d’éthique dès la conception des systèmes ». C’est en relevant ces défis que l’IA pourra devenir une alliée précieuse dans la lutte contre le changement climatique.

Pour aller plus loin, découvrez notre article : comment l’intelligence artificielle promet une transformation des médias ?

You May Also Like